Transformer Gaza en champ de bataille secondaire n’est pas une solution
Un an après l’attaque du 7 octobre et la guerre qui a suivi, il est temps de rechercher une résolution civilisée au conflit, si ce n’est pour les politiciens, du moins pour les familles endeuillées et les cœurs brisés des deux côtés.
Pour la première fois depuis le 7 octobre 2023, Israël a annoncé que la bande de Gaza était devenue un champ de bataille secondaire, en tournant son attention vers le front libanais. Attendez une seconde ! Ne tirez pas de conclusions trop hâtives. Cette décision ne met pas fin à la guerre à Gaza, ne renvoie pas les captifs israéliens chez eux et ne donne pas aux Palestiniens déplacés une chance de rentrer chez eux, d’enterrer leurs morts et de passer quelques instants de solitude sur leurs tombes, en pensant à ce qui était et à ce qui sera.
Cette décision traduit l’intention d’Israël de passer quelques années difficiles à Gaza, en rétablissant son statut de puissance occupante entre 1967 et le désengagement unilatéral de 2005. Cependant, Israël ne s’est pas complètement désengagé de la bande de Gaza cette année-là. Il a continué son siège et a conservé pour lui-même le contrôle sécuritaire global.
Cette décision signifie que l’armée israélienne dans la bande de Gaza passe du rôle offensif proactif qu’elle a maintenu tout au long de la guerre à une mission quelque peu différente consistant à faire avorter d’éventuelles attaques contre les troupes israéliennes ou à répondre à des attaques qui pourraient survenir. C’est en soi une recette pour une occupation prolongée qui impliquerait des escarmouches incessantes entre l’armée d’occupation et les groupes de résistance de diverses factions. Je parie que cela ne faisait pas partie de la stratégie de Sharon lorsqu’il a décidé de se retirer.
Le fait de tourner le temps dans le sens inverse des aiguilles d’une montre n’est d’aucune utilité pour aucune des deux parties au conflit. Les Israéliens jouiraient de la paix et du calme le long de leur frontière sud, même si leur armée établissait à l’intérieur de la bande de Gaza une zone de sécurité de type libanaise le long de la frontière sud avec Gaza. Les Palestiniens de Gaza, quel que soit le type d’accord intérimaire qui leur sera imposé, continueront de considérer Israël comme la puissance occupante qui les a privés de leur droit naturel et légitime à l’autodétermination. Quiconque pensait que la répression militaire pouvait façonner un avenir pacifique s’est trompé, s’est terriblement trompé. Le nombre de morts tant du côté palestinien qu’israélien au cours de l’année écoulée est la preuve irréfutable que seule une solution politique est le catalyseur qui peut faire évoluer notre Moyen-Orient vers un monde différent, un monde de coexistence pacifique entre Palestiniens et Israéliens, chacun dans son État indépendant côte à côte, et un monde de relations régulières entre Israël et les 57 pays arabes et islamiques qui n’ont pas abandonné l’Initiative de paix arabe malgré tout ce qui s’est passé depuis son lancement à Beyrouth en mars 2002 jusqu’à aujourd’hui.
La décision de prolonger le séjour de l’armée israélienne dans la bande de Gaza et d’accroître la pression sur le peuple libanais et le Hezbollah ne garantit pas que la victoire finale de Netanyahou soit possible. Au contraire, un Hezbollah amèrement blessé, chargé de colère et de ressentiment envers Israël après avoir assassiné le premier, le deuxième et peut-être le troisième niveau de sa hiérarchie, est poussé par ce besoin de vengeance et de combattre l’armée israélienne au Sud-Liban beaucoup plus impitoyablement que jamais auparavant. La vengeance est un déclencheur d’imprévu. Même Israël est tombé dans son piège immédiatement après le 7 octobre 2023. Le comportement de l’armée israélienne et les frappes aériennes aveugles sur les civils palestiniens ne peuvent jamais être excusés par les horribles événements de ce samedi 7 octobre.
En entendant ce que les Gazaouis disent de leur condition et de la façon dont le Hamas a manipulé leur fierté nationale jusqu’à les entraîner dans une guerre qu’ils n’attendaient ni ne voulaient, on ne peut que plaindre ces 2,2 millions de Palestiniens qui ont fait face à des défis au cours des 12 derniers mois bien plus nombreux qu’ils n’en ont fait face depuis 74 ans, c’est-à-dire depuis la création d’Israël.
Alors que les Israéliens déplacés au sud ou au nord vivent dans des hôtels payés par leur gouvernement, les Palestiniens déplacés sont dispersés dans toute la bande de Gaza, à l’exception de sa partie nord. Les plus chanceux vivent dans des tentes. D’autres ont trouvé refuge dans des bâtiments en ruine ou au plafond à moitié détruit. Ce qui a aggravé leur situation, c’est le phénomène des pillards qui détournent des convois de camions chargés d’aide humanitaire internationale pour en revendre le contenu à des prix exorbitants. L’armée israélienne n’a pas non plus épargné à ces Palestiniens déplacés l’agonie de se déplacer d’un endroit à un autre. Chaque fois qu’on leur disait qu’un nouvel endroit était plus sûr pour se réinstaller, l’armée de l’air israélienne les prenait pour cible, bombardait leurs tentes, y mettait le feu et, parfois, tuait des dizaines de personnes. Je n’aime pas comparer les tragédies des deux côtés. Chaque famille a son deuil. Rien ne peut sécher les larmes d’une mère en pleurs ou d’une épouse endeuillée. Rien ne ramènera jamais un père, un frère, un fils, un mari, une sœur, ou quoi que ce soit d’autre. Les peuples palestinien et israélien doivent tenir bon, reprendre leur souffle et réfléchir à ce qu’ils peuvent faire dans cette confrontation sanglante et destructrice. Aucun des deux camps ne gagnera jamais, et ils perdront tous les deux, c’est sûr. La violence engendre la violence. Le meurtre engendre la vengeance. Et la vengeance conduit les deux camps à un nouveau cycle de violence, suivi d’un autre, puis d’un autre encore et… sans fin.
Par Elias Zananiri
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